La recherche d’un équilibre agro-pastoro-halieutique

Pour que les rivières puissent toujours accueillir les poissons, la faune et la flore témoins de biodiversité et de qualité sanitaire, pour que les pêcheurs puissent toujours fréquenter les rives de ces rivières, et pour que potabilisation, agriculture et halieutisme ne soient pas antinomiques, une coopération de tous les usagers de l’eau s’impose.

En effet, un mode d’exploitation des prés bordant les berges des ruisseaux de 1ère catégorie notamment, est hautement préjudiciable aux salmonidés et au bétail, par conséquent au pêcheur et à l’agriculteur : c’est le libre pacage, permettant la divagation jusque dans le lit mineur des cours d’eau.

On entend par pacage la stabulation libre en plein air. Cela consiste à entretenir des animaux sur les berges des ruisseaux en leur laissant le libre accès au lit du cours d’eau qui lui assure l’abreuvement nécessaire. L’affourragement quant à lui est assuré, en hiver, par une distribution au râtelier amovible.

Cette pratique entraîne de multiples conséquences

DES CONSEQUENCES ECOLOGIQUES :

Les unes sont peu visibles et constituent la pollution physique, chimique, microbiologique et parasitaire de l’eau par les matières sédimentaires fines remises en suspension, les urines et les selles.

Les autres sont particulièrement spectaculaires, il s’agit de la disparition de la ripisylve et de l’effondrement des berges par le piétinement et de l’envasement du lit du ruisseau, ce qui a pour conséquence le colmatage des radiers et la création d’une cressonnière.

Cet envasement interdit l’accès aux frayères et les endommage, perturbant la reproduction des truites et saumons. De plus il induit une sorte de marécage où les bovins, le plus souvent ne connaissent pas le confort nécessaire à une bonne production zootechnique.

DES DOMMAGES POUR LA TRUITE ET LES SAUMONS :

- cloisonnement du ruisseau interdisant l’accès aux frayères situées en amont.
- destruction des frayères par piétinement et colmatage vaseux du fond du ruisseau.
- atteinte à la qualité de l’eau impropre à la vie des salmonidés.

DES DOMMAGES POUR LES BOVINS :

Le ruisseau devient une source de contagion : un réservoir et un vecteur d’infections microbiennes transmises par l’eau polluée telles que :

  • Salmonelloses
  • Para tuberculoses
  • Colibacilloses
  • Leptospiroses
  • Brucelloses
 
 

De plus, les bovins sont exposés à une maladie parasitaire majeur : la Douve du foie. Cette maladie est due à l’accès des bovins à la cressonnière. En effet, la cressonnière est le biotope d’un escargot d’eau douce la Limnée. Celle-ci est l’hôte intermédiaire et le réservoir où se multiplient les larves de la Douve. Ces larves libres dans l’eau, iront se fixer sous les feuilles de cresson qui seront ingérées par les bovins. La Douve adulte se loge dans le foie et provoque des préjudices sanitaires et économiques que les agriculteurs connaissent bien. Les selles de bovin déféquées dans le ruisseau contaminent celui-ci, et le cycle recommence.

Il y a donc atteinte à la qualité de l’eau qui devient impropre à l’abreuvement du bétail.

DES DOMMAGES POUR LES HOMMES

La qualité de l’eau est rendue impropre à la vie piscicole et à la potabilisation.

Les nombreuses maladies animales citées précédemment, sont, pour la plus part, des Zoonoses, c’est-à-dire qu’elles sont transmissibles à l'Homme.

CONCLUSION

Ce mode d’entretien en divagation non contrôlée dans le ruisseau est réciproquement préjudiciable. Il induit des incidences biologiques délétères :

Recrutement perturbé ou dégradé par colmatage des frayères pour les salmonidés,

Infestations parasitaires

Infections pour les bovins et les humains.

LA SOLUTION ?

Une batterie de mesures s’impose pour pallier à cet état. Un bénéfice rapide résultera des mesures de restauration adéquates misent en place telles que :
- Abreuvoirs spécifiques
- Clôtures protégeant la ripisylve et interdisant l’accès continu des bovins au ruisseau
- Ponts passerelles
- Passages pour pêcheurs et exploitants

Ces aménagements spécifiques assurent la protection réciproque des animaux et l’amélioration des peuplements et des habitats piscicoles, faunistiques et floristiques ainsi que la qualité de l’eau.

Dans cet objectif, la coopération de tous s’impose.

Docteur vétérinaire Christian ALLAIN